tunisien)
– Etudiant à la faculté des lettres
(section «langue et littérature
arabes»)
– a publié dans plusieurs jour-
naux et revues tunisiennes.
– 1er recueil de poèmes : «le soleil
sur mon front» à paraître en arabe
à la M.T.E.
lune et pourtant j’aime la terre et la lune ma
terre est «sebkha» de sel et d’un peu d’eau
point de labour point de moisson ma terre
aucun soc ne l’a dépucelée
Ondule le mirage dans mes yeux
comme mousse marine
o bleu de la mer j’étends ma voile
et je te prends
poussé par le flux, le reflux me repousse
ma voile
aimable comme la mer
fragile comme les ondes
se dessèche le mirage dans mes yeux je
m’enfonce dans le blanc de mon sel
et je m’y noie et
fond mon amour comme grain de sel
blancheur amère
et les fleurs d’amandier s’ouvrent au printemps
le verre a un regard tout blanc
tu parais
et les choses dansent dans ma pulsation
nous nous rencontrons
et les maisons de notre rue prennent une
teinte de gris-cendre
le soleil par dessus les terrasses essuie la nuit
le vieil homme de la mosquée récite ses prières
du ma fin
•*
et les gosses du voisin taquineront notre âne
ensemble nous marchons
et les chiens veulent nous égarer
sans peine sans lassitude
les couleurs prennent d’autres couleurs
et lorsqu ‘ensemble nous revenons
le car du village est déjà de retour
et déjà le vieil homme de la mosquée
fait résonner sa canne sur les marches du minaret
deux, trois, quatre chemins au sahara
nous sèmerons des carrés et que
moissonnent tous nos affamé
Poèmes
de
Souf Abid
Traduits par
Hamadi BELHADJ
Salah Garmadi
Tahar Bekri
Othman Babba
Hédi Khelil
Ibrahim Darghouthi
SIHEM TAJINE
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EL JAZIA
Traduction de :
Hamadi BELHADJ
(Historique)
Dans sa préface, Ibn Khaldoun nous révèle la source la plus lointaine de l’épopée d’El Jazia El Hilalienne, en retraçant quelques poèmes épiques de la Geste Hilalienne, des Béni Hilel.
El Jazia est donc le personnage le plus important de l’épopée des Béni Hilel, qui sont composés de nombreuses tribus arabes ayant émigré, au temps des Fatimides, de l’Arabie Saoudite en Egypte et de là à « Ifriqiya ».
On peut en citer les Béni Sélim Béni Riah et Béni Darid.
******************
La Saga raconte qu’El Jazia se caractérise particulièrement par sa rare beauté, sa chevelure extraordinairement abondante et belle et surtout par sa bravoure, sa probante éloquence ainsi que son raisonnement juste et circonspect.
Elle est donc considérée comme le modèle parfait de la femme idéale.
******************
Parmi les hommes de lettres qui se sont intéressés à l’épopée des Béni Hilel, et à la Geste Hilalienne citons, entre autres les éminents, Mohamed Marzouki et Abderahmane Guiga.
J’étais parmi tous les concurrents
En arrivant devant elle
El Jazia est venue vers moi…
Si elle n’a jamais abordé la mer
C’est que de loin elle l’observa
Sans cesse changer et se renouveler…
Laissant les quais déserts
Les hirondelles ne reviennent pas
Quant il vente
De peur pour leur nid printanier
Ce vent des passions et de la jeunesse…
J’entends cet appel ? « Fils »
Qu’elle est douce la voix de ma mère
Comme la senteur du musk
Me couvrant elle me dit :
Que ton cœur soit comme un moulin
Ou comme le rocher du fleuve
Qui, toujours creusé par l’eau
Ne pouvait être emporté par le torrent
Et elle dit :
C’est le fleuve, fleuve d’espoir doux
Comme les mers rêvant les immenses crêtes
Tu marcheras sur des braises
Mais je les vois se réduire en cendre
Vole mon fils comme l’oiseau matinal
Et traverse le monde de pays en pays
Le monde par tes ailes sera éclairé
Comme pour le fidèle amoureux
Aussi méfie-toi de la chevelure d’El Jazia
Ne sois ni opiniâtre ni obstiné…
Mais me voilà ensorcelé par sa beauté
Car celui qui aime oublie la raison
Et ma monture est presque prête…..
……………………………………..
Sept colombes ont pris l’envol
En se posant près du fleuve de Gabès
L’une d’elles est blanche
Elle n’a pas goûté l’eau depuis la veille
Et un amoureux courtise sa dulcinée
Avide et assoiffé.
………………………………………
Assoiffé, assoiffé et esseulé
Courant vers elle, rien que pour elle
Poignardé de quatre vingt dix neuf coups
Par les cavaliers de Beni-Hilel
Aucun coup ne rata le cœur ni le tua
Ni le fit tomber de son cheval
Qui n’a pas trébuché
C’est l’amoureux qui attend
Depuis un siècle
Mais une nuit, après tout ce temps
Elle le rencontrera
Et il la rencontrera
Elle sera la première
A lui tendre les bras.
………..
Celui qui gaspille de l’or
Au souk des orfèvres le retrouvera
Celui qui perd son amour
Après un an il l’oubliera
Mais celui qui perd sa patrie
Où peut-il la trouver ?
……………
Il partit sur une route déserte
De campement en campement
Comme attiré par un fil
De la chevelure d’El Jazia
On l’entretint sur ses yeux :
Deux étoiles dans une sombre nuit
On l’entretint sur ses lèvres
Deux braises d’un ardent brasier
On lui parla de ses mains
Elles sont aussi lisses que la soie
On lui parla de sa taille
Elle est fière mais cristalline
Aucune ne peut égaler El Jazia
Qui éclaire sans flambeau.
………………
Un matin les chameaux gémirent dans la place
Les timbales battirent
Les guerriers se rassemblèrent
Autour d’El Jazia
Les nomades se consultèrent
Puis clamèrent
On part… on part.
A ce moment elle se montra
De sa litière et s’écria :
« O peuple »
Qui est l’homme le plus valeureux
Toute l’assemblée murmura
Puis s’excita et s’agita
Quand vers sa litière
Le camp de Béni Hilel s’approcha
Et quelqu’un dit :
C’est le premier dans les rangs
Et vainqueur dans les combats
Puis s’approcha le camp de Béni Sélim
Et quelqu’un dit :
C’est celui qui tient sa parole
Et donne avec générosité
Puis parut le camp de Béni Riah
Et quelqu’un dit :
C’est celui qui manie bien le sabre
Et bien connu des lances
Puis le cheikh de Béni Darid dit :
C’est celui qui est éloquent dans le silence
Et captivant quand il parle.
………………………..
Sept jours après le départ
Les jeunes filles se rassemblèrent
Un matin, autour d’El Jazia
Près de la source
Toutes pétulantes dans l’eau
Elles la virent, par sa chevelure
Voiler la clarté
En disant avec coquetterie
Y a-t-il parmi vous
Celle qui puisse décrire
La plus belle des femmes ?
Une beauté de Béni Hilel répliqua
C’est celle qui appartient
A une vénérable famille
Et possède un grain sur sa joue
Puis une servante des Béni Sélim dit
C’est l’épouse fidèle et procréatrice
Possédant des yeux de gazelle
Puis une beauté des filles de Riah dit
C’est la brune couleur du Musk
La blanche comme la clarté du matin
C’est alors que la plus belle des Béni Darid dit
C’est celle que sa beauté grandit de jour en jour
Alors toutes les filles se groupèrent
Autour d’El Jazia qui chanta.
…………………..
Ne sois pas trompé par la beauté
Des fleurs du rosage
Qui ombrage les bords des fleuves
Ni de celle d’une fille
Avant de t’assurer de ses mœurs.
…………………………
C’est la beauté qui ensorcelle
Quand elle sourit
Le muscat se sent offensé
Sa voix en discutant
Est pareille au fleuve courant au galop
En déambulant, son corps
Allume ma route de désir
Et de flamme…De l’orient à l’occident
Elle part avec le camp
Et sa litière trotte
D’un endroit à un autre
Sur des chemins longs, pénibles
Et tortueux
Des fois, escarpées et d’autres
Bordant les précipices…Il suit toute trace pouvant
Le conduire vers elle
Demandant à tous les passants
Même dans le désert il appelle.
Jazia
Jazia
Jazia
…………..
Des fois, je possède sept langues
Et pas de bouche
Des fois je parle sept langues
Sans être compris
Des fois j’allume mes doigts
Comme des cierges
Mais ma nuit est aussi noire que du charbon
Des fois les couteaux s’aiguisent
Et étant la chair
Je nage entre les vagues
Et ma mer est de sang.
Des fois je dis que c’est la fin du monde
Puisqu’il n’y a plus ni oncles ni amis
Des nuits, je dors à la belle étoile
S’il le faut, avec les étoiles
Je pleure sans larmes
Tout en me voyant sourire…
……………
Quand la nuit vint
Elle dévoila un coin de sa tante
Pour observer les étoiles
Et contempler l’étoile des Gémeaux
Personne dans le signe du Lion
Ni eau dans le verseau
Cette nuit est la sienne
De loin c’est son ombre
Qui parait sous la lune
El Jazia toute saisie, dit :
Lui – non – lui – non
Mais c’est bien lui qu’elle attend
Ses traits comme indiqués
Par la voyante
C’est bien la nuit de sa rencontre
Avec cette vérité le récit s’arrête là.
…………………..
Si la parole est d’argent
Le silence est d’or
Donc à toi de choisir
Ce que tu veux
……………………
Elle détacha sa chevelure
Lu mon histoire dans la sienne
Et dit doucement :
S’ils mettaient le paradis
Dans mes escarpins
Je viendrais à toi pieds nus
S’ils versaient la pluie dans mon verre
Ma soif ne serait étanchée que par toi
S’ils mettaient la nuit sur ma tête
Tes brillantes étoiles m’éclaireraient
S’ils tissaient avec de l’or mes habits
Te voir suffirait à ma quiétude
Tu es l’âme de mon âme
Et toujours en moi
Puis dit couramment
Tu es l’amant qui éclaire
Mon cœur qui t’appelle « Mon maître »
J’ai bien prévenu mon cœur
Malheur à lui de ne pas m’avoir écouté
Tu es l’amant qui pour mon âme
Luit comme une lampe
Réfléchissant comme un miroir sa lumière
Et comme une draperie de soie
Me couvrant comme une parade
J’ai dit :
Quels chemins t’ont amenée de l’orient
Et de quel endroit as-tu traversé les bornes
Jusqu’à cet occident
Pour arriver à cet endroit.
Elle dit : La patrie est la mienne
Depuis toujours
Depuis les Amazighes jusqu’à Kanaân
Le monde est composé de nations
Pour les hommes
Si Elyssa avait vogué un peu plus
Si Annibal ou Okba ou Hassan
Avaient fait un pas de plus
On aurait découvert la mer obscure
Pourquoi as-tu incendié, ô Tarak
Ces voiliers
Les francs sont venus après
Groupe par groupe
Les vagues ont failli nous noyer…
………………..
Malheur à Zarzis et ses dulcinées
Les chrétiens l’ont envahi
Et saccagé son mausolée
……………
Cette nuit elle me frôla
Avec des doigts pareils au duvet du pigeon
Elle vola si haut et très loin
Et s’écrasa dans sa chute
Elle, c’est le « Finik »
Un oiseau agitant ses ailes
Comme une braise, mais tel un brûlé
Traversa l’espace en montant
Avec ses plumes brillantes
Chaque fois que les étoiles disparaissent
Dans la nuit, l’aube apparaît.
Je me suis réveillé
Quand le soleil frappa mes yeux
Mais j’ai trouvé le lieu désert
Ni tente
Ni tentures
Ni piquets
Ni chevaux
Ni chameaux
Ni gardes
Ni El Jazia
………………………
Ils ont conduit le camp, le menant
A travers les fiefs
Où t’ont-ils emmenée
O pure beauté ?
…………………………..
Comment se sont échappées
D’entre mes doigts
Ces nattes – celles qui étaient
Maintenant
Et
Ici ? Seul avec mes lourds souvenirs
Pleurant l’éloignement de l’aimée
Partie brusquement
Après avoir pris mon cœur
Pour patrie…
Elle est la loi et le pouvoir
J’étais comme celui
Qui tomba dans un puits
Profond de soixante-dix coudes
Dans un sommeil profond
Comment puis-je écouter
Sa voix mélodieuse
Et sentir son parfum enivrant
Elle a noué autour de mon doigt
Un anneau de ses cheveux
Et autour de mon cou un collier
En souvenir d’une certaine nuit
Comme preuve…
……………
Si on s’égare en cours de route
C’est elle qui est le guide
Du Hijaz au pays du Nil
Et de Fazzan à Kairouan
Elle est venue, j’ai dit : sois la bienvenue
Le soleil, s’il l’avait aperçue
Ses rayons seraient de l’ombre
Dieu quelle stature
Tel un jardin embaumé de fell
Les pommettes comme des roses
Qui sentent l’aromate
Dis : elle est la beauté
Et sa bouche est plus belle.
Le visage est pareil à un astre
Eclairant la sombre nuit
Quand au front une clarté
Pour une chaste prière
La chevelure étalée
Abondante et longue
Le regard prit mon cœur
Qui vola vers le ciel
Comme l’aimée est si loin
La voilà à kairouan.
Doucement O peuple
Dit El Jazia
Ne voyez -vous rien derrière les collines
Parmi les nuages ?
Ils ont dit : si
Elle montra avec un doigt
Couleur de henné
Là dans le lointain
C’est Tunis la verte.
A Tunis la verte apparaissent des châteaux
Des tours fortifiées si hautes
Où gîtent les vautours
Comme le rocher sur les montagnes
Résistant aux romains et aux années
Ces forts sont un gîte pour les Amazighes
Et leur plate forme, des tombes
Pour les envahisseurs
Etalés logis sur logis parmi les vallées
Les camps de passage peuvent trouver asile
Toujours et à chaque saison on les voit
La main ouverte et le visage souriant
Ils viennent de partout
Nous saluer avec joie
Ce sont les Amazighes nos cousins à « Ifrikia »,
Ils nous ont devancés
Des liens nous rattachent depuis des siècles
De Babel à Nabeul
De la Medjerdah à Baradah
De Houlouane à Tatouane
De Nabless à Tripoli
Et de Mahdia à Alexandrie
Tunis est un pays arabe.
C’est Tunis de l’intimité
La rencontre des amis
Avec le salut nous entrons
Non en guerriers
A ce moment Younés dit :
C’est Tunis
Avec des portes dans des portes
Bab B’har
Veille jusqu’à l’aube
Bab Djazira Sa terre est fertile
Bab Djedid
Ses gardes sont vigilants
Bab Menara
Des souks et du commerce
Bab El Kasbah
Pour le sultan et ce qu’il possède
Bab Benat
Prends- moi et donne (partageons, échangeons)
Bab Souika
Je m’égare en chemin
Bab Sâdoun
O quels beaux yeux !
Bab Carthage
Nous y entrons
Groupes après groupes.
Elle est passée
Convoitée par tous
Mariée incomparable
Avec un regard, dardant
Une bouche faisant entrevoir
Un sourire rayonnant
Et un grain sentant le musk
De sa beauté que de coupes j’aurais bues
Si la nuit du destin m’avait croisé
J’aurais demandé que je sois le marié
Ensemble, nous récolterons la nuit
Etoile par étoile
Seuls tous les deux sans rien d’autre
Que notre amour
L’amour nous comblera de souhaits
Et de désirs
Je la couvrirais, je la couverais
Elle serait comblée par mon amour
………………………….
Le camp se rassembla une nuit
Les vieux et les cavaliers discutèrent
Puis on lui dit :
Et toi El Jazia !
Elle répondit :
-
La terre à toujours besoin d’eau
-
La femelle à toujours besoin du mâle
-
L’œil à toujours besoin de la vue
Puis elle chanta :
Malheureux est le chameau des Noria
La chaleur l’étouffe
Percevant l’eau avec ses oreilles (son ouie)
Mais ni ne la voit ni ne la goutte
………………..
Voici l’ultime chanson d’El Jazia :
O personnel du camp active
Décampe s’ils arrivent
Nous émigrons depuis toujours
Sans faire reposer nos chevaux
O chamelle du vent court
Tant que le cœur bat toujours…
Puis elle monta sa chamelle et s’envola.
Elle s’envola vers le sud
Où les chemins ont verdi
Elle s’envola vers le nord
Où la vue est magnifique
Elle s’envola vers l’orient
Comme un éclair
Elle s’envola côté occident
Dans une parure arabe
Elle s’envola vers les rivages
Avec son camp cheminant
Elle s’envola vers les contrées
Aussi vertes que fertiles…
Une chevelure drue
Sur les épaules
Son parfum m’est parvenu
Petits pas de pigeon
Le pigeon s’envola
Me laissant chercher
Sa trace.
.
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Le hennissement des chevaux
traduit par Salah Garmadi
* Écrivains de Tunisie
Édition Sindbad Paris, 1981
Quand elle avait eu un certain âge,
Tous les matins
Le tenant par la main…
Elle accompagna au marché son père L’aidant à pousser la charrette.
Ravie, le soir,Elle rentrait avec lui,
Mais, au fil des jours,
elle apprit à errer à travers les marchés,
Les pieds nus, à la poursuite de touristes.
Un jour, elle trouva chaussures à sa pointure,
don d’un vieillard, dans les dédales d’un couloir…
Tout d’abord, elle ne sut comment s’y prendre
Pour les lacer.
Cependant, au fil des jours
Elle apprit le laçage,
et porta aisément ses chaussures
et ce fut comme si l’univers entier l’accompagnait.
Autodafé de livres
Les colonnes des mosquées en sont toutes noircies
Et les chevaux des espagnols étaient attelés
Dans la cour de la grande mosquée
Les pigeons de la grande mosquée
Tournoyaient par-dessus les terrasses
guettant l’appel à la prière de l’aube
pour picorer les grains près du minaret.
Quant elle avait eu un certain âge
Elle s’assit avec les chômeurs dans les cafés
Passait d’une table à l’autre dans la fumée du tabac.
S’éparpillant ainsi à travers leurs paumes
Parmi les cartes à jouer.
Elle errait longtemps sur leurs vêtements bleus
Puis disparaissait,
Pour aller sur le pont
Faire refléter dans l’eau sacrée
La silhouette fantomatique de son visage.
Elle regardait les poissons nager à volonté
Et puis, s’en retournait,
les joues couleur de pomme
sentant sur sa poitrine le fruit du grenadier
et parfumant ses yeux de la fleur de l’amandier.
Les balcons du palais rêvaient en été,
Caressés par la brise marine.
Cette nuit, les belles esclaves eurent chaud,
Elles descendirent vers la mer, toutes nues
Et s’étaient prélassaient au clair de la lune.
Pendant ce temps,
Le jeune mignon slave se trémoussait
sous la panse de son maître !
Quand elle avait eu un certain âge
Elle se tint debout avec les gens au centre de la place.
Les soldats traînaient un homme par les pieds,
Et malgré son jeune âge,
Elle supportait de le voir battu
Avec patience, elle attendit
Jusqu’à ce qu’ils lui eurent coupé
la langue,
les mains,
les pieds,
et la tête.
Elle s’enquit auprès des gens
On lui répondit par chuchotements
Dans le creux de l’oreille…
Depuis, elle fut fascinée par la rougeur du sang.
Les puits de pétrole
Prirent un bain de soleil sur le sable,
Les entrailles gonflées d’or noir,
Les caravanes des nomades
S’apprêtèrent à prendre le chemin de l’oasis.
Le chant du conducteur de chamelles s’est tu
Une dune prit l’apparence d’une touriste américaine.
Pour lui faire plaisir,
Il improvisa un poème de mille vers
Qu’il chanta aux chamelles
Uniquement elles,
Connaissaient la chaleur torride des sables.
Quand elle avait eu un certain âge
Elle pénétra dans la mer jusqu’aux chevilles ?
Eparpillant sa chevelure aux vents,
Les pêcheurs aux filets lourds la contemplèrent,
Se tressant les cheveux en rameaux d’olivier,
Et s’en allait battre les pieds au Sahara
Courant parmi gazelles ?
Apercevant entre les dunes les ombres oasiennes
Les ruisseaux et le soleil
Dardant ses rayons à travers les palmes dorées.
Les souliers des élèves sont écorchés
Dans ces lits d’oueds rocailleux,
Le chemin de l’école est dur et long,
Le chemin de l’école devient doux et court
grâce aux jeux d’enfants.
Le soleil compose sur leurs fronts les traits bruns
Des esquisses de l’avenir.
Ils se rassemblèrent au marché du village,
Autour de la voiture de bienfaisance
Et interrogèrent le chauffeur
sur les causes de la présence du sigle
« USA » marqué sur les sacs et les boîtes.
Quand elle avait eu un certain âge,
Elle imprimait son nom avec le henné des jeunes mariées,
tout en portant des explosifs sous son manteau
A travers marchés et bousculades…
Quand la nuit tombait sur ses épaules,
Dans cette forteresse d’acier ,
Elle regardait le croissant de lune
Se pencher au-dessus du minaret.
Veillant tendrement, semblable à ses propres paupières,
Se penche le sommeil,
Alors, elle s’endormait jusqu’à l’aube
Sur les nattes des mosquées
jusqu’à ce qu’elle put distinguer le fil noir du blanc.
Le pèlerinage s’était achevé comme d’habitude
Dans d’excellentes conditions
Le chiffre d’affaire des compagnies aériennes s’éleva.
Mille pèlerins moururent,
piétinés dans la bousculade,
D’autres rentèrent chez eux, sains et saufs,
Leurs valises lourdes d’encens
Et de gomme à mastiquer.
Les pèlerins répétèrent inlassablement
Les recommandations du gardien du tombeau du Prophète
Que ce dernier lui révéla dans les songes :
« Seul Satan doit supporter les conséquences du péché !
Seul, il doit être lapidé une fois par an ! »
Quand elle avait eu un certain âge,
elle dansa dans la caserne sur des crottes des ânes
et respira avec dégoût l’odeur forte des soldats.
Tous les envahisseurs furent passés
Par le détroit de ses seins.
Puis, un matin, ils s’en allèrent.
Elle ignorait alors que c’était pour revenir
Et qu’un jour, elle danserait pour eux,
Sur les tapis des hôtels .
Les chevaux des Européens aimaient skier sur le sable,
L’été, ils étanchaient leur soif aux puits.
L’hiver, ils s’y vautraient en quête de chaleur.
Ils cherchaient à cacher le soleil avec un tamis
et donnaient à la danseuse des contraceptifs.
Des pyramides de Guizeh dégoulinent toujours
A travers le temps,
La sueur des esclaves ,
Les chaînes de l’Atlas croupissent sous les chaînes,
La Méditerranée rêve sur le banc d’écume,
La Mer Rouge est attirée vers la cime du rouge,
Le golfe sommeille sur le sel
Et le paradis d’Allah est un projet-verdure sur le Sahara
Arrosé par l’eau des barrages.
Quand elle aura un certain âge,
elle apprendra l’art de marcher sur les Eaux,
Ses pieds deviendront trop grands pour ses chaussures,
Ses pas sur le pont se feront plus vastes.
Elle passera avec les autres,
Avec eux, elle aura les mêmes yeux
Sous les rayons aveuglants du soleil.
mon amour grain de sel
point de terre à ma droite
à ma gauche point de lune
et pourtant j’aime le terre et la lune
ma terre est “sebkha” de sel et d’un peu d’eau
point de labour
point de moisson
ma terre aucun soc ne l’a dépucelée
ondule le mirage dans mes yeux
comme mousse marine
o bleu de la mer j’étends ma voile
et je te prends
poussé par le flux, le reflux me repousse
ma voile
aimable comme la mer
fragile comme les ondes
se dessèche le mirage dans mes yeux
je m’enfonce dans le blanc de mon sel
et je m’y noie
et fond mon amour
comme grain de sel
blancheur amère
les portes du paradis
au paradis nous ouvrirons des chemins
deux, trois, quatre chemins
au sahara nous sémerons des carrés
et que moissonnent tous nos affamés
d’autres couleurs
tu parais
et les fleurs d’amandier s’ouvrent au printemps
le verre a un regard tout blanc ma pulsation
nous nous rencontrons
et les maisons de notre rue prennent une
teinte de gris-cendre
le soleil par dessus les terrasses essuie la nuit
le vieil homme de la mosquée récite ses prières du matin
et les gosses du voisin taquineront notre âne
ensemble nous marchons
et les chiens veulent nous égarer
sans peine sans lassitude
les couleurs prennent d’autres couleurs
et lorsqu’ensemble nous revenons
le car du village est déjà de retour
et déjà le vieil homme de la mosquée
fait résonner sa canne sur les marches du minaret
ـــــــــــــــــــــــــــــــــــــــــــــــــــــــــــــــــــــــــــــــــــــــــــــــــــــــــــــــــــــــــــــ
La fourmi
* Traduit par Tahar Bekri
Littérature de Tunisie
Europe
revue littéraire et mensuelle
octobre 1987
La fourmi qui s’en va
Lente et rapide,
Sous les rochers,
Dans les labours,
Rêve de charogne et de blé.
La fourmi qui sillonne
Les pays verts et les déserts,
Pénètre les grottes et les palais.
La fourmi travailleuse et laborieuse,
Vit en ignorant la soif et l’ombre.
La fourmi qui colle à la terre,
Grimpe aux fruits
Et tient compagnie dans la tombe.
La fourmi qui emplit le regard
Et use la beauté,
Le pied l’écrase,
Mais, inlassable, elle continue son chemin
Le cheval blanc
Il m’offrit un cheval blanc
Et une selle en cuir rouge,
Il traça une ligne avec sa canne sur le sol,
Il m’indiqua la direction,
Puis, partit.
J’ai murmuré pour m’informer
J’ai couru essayant de le rejoindre,
-
-
J’ai couru…
Mais, comme son turban était vert !
-
LE CORPS
traduction SIHEM TAJINE
Oh ! corps chevaux et nuits
Oh !corps jours et lumières
Oh ! corps volcans et déluges
Oh !corps vents et fécondation
Oh ! corps fruits et fleurs
Oh ! corps saisons et arrivées
Oh !corps sable et destruction
Oh ! corps envies et colères
Oh ! corps corps et corps
Tu brules et tu t’éteints
Soit flamme du foyer
Soit cendre du cendrier
Ce soir tu es simplement
Homme
Sans
Femme!
-
-
___________________________________________________________________
-
traduit par Othman Babba
-
-
La mariée
-
-
-
La mariée !
C’est son jour … Elle s’est apprêtée !
Elle a ouvert le coffre de son enfance :
Ses poupées sont toujours
En robe de mariée
Telles qu’elles l’étaient depuis une année,
Et une année, et une année…
Elle les regarde…
L’une … Et puis, l’autre …
-
Elle les regarde…
Et les regarde encore,
Puis, se retourne vers elles
Et dit :
« Je suis la plus belle ! »
-
-
Visage contre visage
-
Le rendez-vous
Auquel aucun des deux amants ne s’est rendu,
La pendule murale s’est arrêtée à cet instant
Et à cet instant le verre s’est calcifié,
Le bouquet de rose s’est enflammé
Et braise ardente est devenue la table.
Le bistrot s’est alors enfumé,
Et eux deux,
De loin
Visage … contre visage
Ils ont attendu !
Liaison
Première rencontre :
Tous deux sont arrivés avant le rendez-vous,
Ils ont pris place
Et ont laissé entre eux
Un espace…
Les mots ont dévancé leurs lèvres
Et le temps s’est écoulé
Plus rapide que les battements du cœur.
Deuxième rencontre :
Tous deux sont arrivés encore en avance
Pour le rendez-vous,
Les jeux de doigts ont permis
A leurs bras de se tendre et ils ont lu
Dans les pommes de leurs mains.
Ils ont été deux jumeaux
Au moment de la séparation…
Dans la place …
Ils se sont soudés l’un à l’autre,
Semblables à deux âmes-sœurs.
Troisième rencontre :
Ils jetèrent les habits de ce monde
Pour se couvrir des feuilles de paradis
Il était Adam ! Elle était Eve !
Et ils ont croqué à pleines dents …
La pomme !
L’arbre
Ce tronc et cette branche se sont entrelacés
Tels des amoureux qui s’embrassent
Et si les amoureux
Tous, se donnaient rendez-vous là ?
Boutons
Sur le carrelage de la chambre
Vide
Elle l’a déboutonné
Bouton
Par boutons
Puis …
Elle s’en est vêtue !
Schéhérazade
Parle-moi de toi
Et de la blessure ancienne
Joue-moi un air … sans cordes
Et lave-moi de lumière,
Puis, étends-moi sous la pluie
Pour que je revienne te voir,
Aussi blanc que le pur jasmin,
A la lumière du matin,
Alors, ne mets pas fin à la parole permise !
Avec les mots les plus doux,
Parle-moi de toi,
Avec des lettres voltigeantes,
Autour de tes lèvres
Décris-moi des visions
Sublimes !
Les îles lointaines des bouts des mers,
Les astres merveilleux,
Les temps passés et les époques à venir,
Car je n’ai pas de projets d’avenir,
Car je n’ai écouté personne,
A part toi !
A l’encre bleue
Mes mots sont amandes,
Ornements des jours de fêtes.
Ils fleurissent malgré la sécheresse
Et résistent aux assauts du vent …
Entre les fentes des rochers,
Sur le sel,
Sous le gel,
Ils enfoncent leurs racines.
Fleurissent, alors, leurs branches
Avant le printemps !
La bague
Parfois, pour son calme,
Et d’autres , pour sa colère,
Elle a aimé l’homme de la mer,
Lié à ses filets tous les matins
Et à la voile de sa barque qui flotte.
Un jour,
L’homme de sa vie a disparu,
Dans le lointain…
D’un soir à un autre,
D’un jour à trois,
La barque n’est pas revenue.
Elle s’est assise face au bleu de la mer
Et y a trempe son doigt !
Henné,
Sel
Et rouille.
Tresses
Une fois,
Tu es venue vers moi,
Les cheveux flottants jusqu’au bas des reins,
J’ai senti la feuille trembler
Sur sa branche.
Une fois,
Tu es venue vers moi les cheveux tressés,
Deux cordes de chanvre :
Une corde pour ligoter,
Une autre pour pendre !
Les cheveux coupés,
Je suis allé, une fois, vers toi,
Maudites soient les mains du coiffeur !
Mais, celui qui a tout ressenti
Etait
Entre le bourreau
Et la potence !
La rose
Me rendant vers une ville,
Sur ma route,
Une rose m’a subjugué !
Epanouie, rouge, flamboyante,
Dois-je la cueillir ?
Non !
C’est un sacrilège
Qu’une main la touche !
Arrivé à la gare,
Je l’ai retrouvée,
Devant moi …
Flétrie, passant d’une main
A l’autre !
Séparation
Celle que j’ai aimée
A mêlé ses cheveux à la nuit,
Les a peignés avec des fils de lune,
Eparpillement de fleurs
Sur du sable.
Celle que j’ai aimée
A défait sa ceinture à la mer
Et s’est ceinte de deux vagues,
Elle s’est échappée comme un poisson !
Celle que j’ai aimée,
Je l’ai aperçue, une fois, à la gare,
Elle était pressée
Et je partais en voyage.
Je l’ai appelée …Et encore appelée
La foule nous a séparés !
Le contraire
Le soleil, Le soleil …
Ce soleil qui touche les toits
Assèche les vêtements
Etendus sur la corde à linge !
Demain sera rouge
Avec un petit froid,
Aujourd’hui sera vert
Avec quelque feu
Et blanc d’une telle blancheur
Qu’aujourd’hui sera sans ombres.
Et il arrive que le soleil
Tombe de son cercle.
Le soleil de notre fusion
Nous étendra demain.
Troncs si hauts,
Et très hauts dirigent
Nos doigts
Vers des directions opposées.
Doigts
Doux sont des doigts des fourmis sur la peau !
Ouvre alors la fenêtre de ta demeure
Et plonge tes doigts vers le bas !
Il existe un lac
Qui frôle les murs de ta maison …
Trempe tes doigts dans ce lac,
Comme dans le café
On trempe les morceaux de sucre !
La cave
Dans notre vieille maison
Le soleil paraît, il trébuche devant moi
Puis, s’enfonce dans le sable !
Les étoiles sont plus proches de moi
Que la place du marché !
Combien de fois, mes yeux ont acheté
Aux étoiles
Des images en couleurs !
Combien de fois ai-je considéré
Le croissant de lune comme une balançoire
Et combien de fois lui ai-je lavé les mains
Dans une cuvette en argile !
L’adresse
Le voyageur s’arrêta au milieu de la place,
Demandant son chemin/
« – A gauche, puis, à droite !
-
Merci.
-
A droite, puis, à gauche !
-
Merci. »
Le voyageur attrapa sa valise
Et continua,
Tout droit !
Palmier
Oh! Palmier !
Sur ta poitrine, les dattes
Se balancent
Et dans ton tronc coule
La sève douce et pure !
Comme elle est délicieuse la coupe !
Alors, décastère-nous, Palmier
Et apprends-nous
A effacer la tristesse
Et quand soufflera le vent de la gaieté !
Lapsus
Sur le tableau, l’institutrice a écrit :
« Chaque fois que je vois une cage,
Je me rappelle l’oiseau ».
L’élève lit :
« Chaque fois que je vois une cage,
Je me rappelle la liberté.».
La ville des manèges
Emmenez-moi
A la ville des manèges !
Que je me balance
Au gré du vent
Et laissez-moi
Sur un nuage me reposer !
Laissez-moi monter dans le train de la peur
Mais évitez de le laisser attendre dans une gare !
Le port
Bleu,
Bleu, bleu !
Vert,
Vert, vert !
Noir,
Noir, Noir !
Le premier regarde la mer et dit : « La mer, sel en fureur ! »
Le deuxième dit : « La mer, pur cristal ! »
Le troisième dit : « La mer, un lion furieux ! »
Le quatrième entasse ses filets au fond de la barque
Et s’en va…
Combattre les vagues…
Kamikaze
Avec deux ailes de papillon
Et une bougie à la main,
Je suis entré au cœur de la tempête
…C’était ma cendre,
Lorsque l’arc en ciel
Etait apparu à l’horizon.
L’homme de la pluie
Un homme, sous les rafales de pluie,
Marchait doucement et avec fermeté,
La pluie s’était arrêtée,
Le soleil s’était dégagé.
Un passant lui avait donné ce conseil:
« – Monsieur… Oh! Monsieur !
Il fait beau…Fermez votre parapluie !
Plus de pluie ! »
Il lui avait répondu tout en marchant :
« – Regardez dans l’horizon…Les nuages s’approchent ! »
La route
Ne marche pas devant moi
Il se peut que je ne puisse pas te rattraper !
Ne marche pas après moi
Il se peut que tu ne puisses pas me rattraper !
Marche à mes cotés,
Sois mon compagnon de cœur…
Car la route est bien longue !
La Machine Infernale
Traduction de :
Hamadi BELHADJ
Ses portes sont blindées
Ses pierres sont de masses de taille
Ses hautes murailles sont de béton et d’acier
Elle se meut par la force du vent
S’il cesse de souffler
Elle se meut au fuel
S’il n’y a plus ni fuel ni gaz
Elle se meut à l’énergie électrique
Si celle-ci ne fonctionne plus
Elle se meut à l’eau
Si les sources et les cours sèchent
Elle se meut des puits avec des verseaux
Si l’eau tarit
Elle se meut par les torrents et les fleuves
Si la sècheresse devient totale
Et que la pluie manque
Ne laissant au fond des lits que des galets
Elle se meut alors par les flots des mers et des océans
Si toute l’eau est épuisée
Elle se meut avec le sel des marais
Si elle atteint le sous-sol
La machine se meut
Par la force des bras
Les bras des esclaves
Si un jour ils sont libres
Elle se meut avec
La sueur des travailleurs
S’ils font grève
Elle se meut avec les dollars des milliardaire
S’ils font faillite
La machine les broie
Et se meut avec les valises des ministres
S’ils sont déchus
Elle se meut avec les sièges des présidents
S’ils tombent aux élections ou par coup d’état
La machine met bas les trônes des monarques
Et les couronnes des rois
S’ils sont emportés par les révolutions
La machine broie les peuples
Les tord et les presse
Et se meut avec leur sang
En disant : « A qui le tour ? »
Elle broie le blé, l’orge, le froment
Le riz, le café, le sucre en disant : « A qui le tour ? »
Elle broie les bambous
Les figuiers, le lotus, l’alfa
A qui le tour ?
Elle broie les vignes, les oliviers les palmiers les orangers
Les amandiers les bananiers
A qui le tour ?
Elle broie les forêts, les jardins les rosiers
Les fleurs, le jasmin
A qui le tour ?
Elle broie les chevaux, les moutons, les vaches
Les gazelles, les oiseaux, les papillons
A qui le tour ?
La machine broie les remparts
Les Pyramides
La tour de Babel
La tour Eiffel
La muraille de Chine
Les aqueducs de Carthage
Les colonnes de Petra
Le phare d’Alexandrie
Le colisée de Rome
Les gratte-ciels
A qui le tour ?
La machine broie les montagnes
A qui le tour ?
Elle broie la terre et ses habitants
A qui le tour ?
Elle broie l’astre lunaire
A qui le tour ?
Les constellations, les étoiles
A qui le tour ?
Et la machine en veut toujours
Jusqu’à ce que ses roues
Se retournent sur elle-même
Broyant ses dents et ses chaînes
Avec ses dents et ses chaînes et tombe
« Comme des troncs creux de palmiers »
Et ainsi commencera une ère nouvelle…
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Un rêve
traduit par Ibrahim Darghouthi
J’ai cueilli
Une fleur
Rouge,
Ecarlate,
Epanouie,
En me réveillant
J’ai découvert ma main
Qui serre
Des épines !
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L’olivier
Traduit par Hédi Khelil
Né à Ghomrassen en 1952, Souf Abid est titulaire d’une licence d’Arabe (1976) et d’un diplôme d’étude approfondies (1979) obtenus à l’université de Tunis. Sa carrière littéraire commence en 1972, année qui marque l’échec du mouvement d’avant-garde dont il adoptera pourtant le principe de ce qu’il est convenu d’appeler « ni classique, ni libre» et l’exigence de mettre l’accent sur les réalités Tunisiennes. Au fil des années, il abandonne le ton prophétique qui caractérisait ses premières productions pour aborder des thèmes existentiels dans lesquels s’expriment les conflits et les déchirements qui le travaillent. En cela, il est l’un des rares vétérans qui ont su s’adapter à la nouvelle donne et partager les interrogations posées par la génération actuelle.
Entre le bleu du ciel
Et le bleu de la mer,
Entre deux rivages rougeoyants :
L’éclat du ciel
Et les reflets dorés du désert,
Entre des rivages blancs,
L’étendue des steppes.
Sur chacune des branches
Du figuier et de l’olivier,
Le pain cuit sur les braises,
Aussi doux que la promesse
D’un nouvel amour
Et l’huile aux reflets d’or
Cuvée dans les vieilles jarres
Est aussi exquise
Que le nectar de la terre !
Je te salue,
Arbre de la vie,
Lumineux
Et culminant vers les cimes !
Le temps qui courbe nos échines
N’a pas de prise sur ton élan !
C’est vers toi
Que reviennent nos pas perdus,
Au gré des chemins
Pour te prier d’expier nos péchés
Et d’émousser nos chagrins.
Il se profile
sur l’étendue de la terre,
Ferme et robuste,
L’arbre qui nous abrite sous sa verdure
Au travers de son feuillage.
Des étoiles percent de leur éclat
Les ténèbres de la nuit,
Dans la rugosité de la roche,
Dans le sable et dans la terre salée,
L’olivier pousse et fleurit
C’est le seigneur dans sa parole
Qui l’a béni !
Tunisien,
Ni d’Orient, ni d’Occident,
Il prend racine dans nos cœurs,
Au plus profond de nos âmes,
Ses fleurs ont la blancheur du jasmin,
Elles décillent au printemps
Et remplissent l’air de leur parfum
Dans l’ombre douce de tes branches.
J’écris sur tes feuilles vertes
L’histoire de mon amour éternel,
Avec l’huile dorée
Puisée dans la lanterne divine !
De cette huile étincelante,
Jailliront les lumières
Pour annoncer une aube nouvelle
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En rouge sur La Méditerranée
Trad. Tahar BEKRI
1
Six heures du matin
Sans m’avoir lavé le visage
J’ai ouvert la télévision
Le matin a le rougeoiement de l’horizon parvenant d’Orient
Qui sait qu’il se lèvera aujourd’hui encore de sang
Dans lequel naviguent des bateaux
Des bateaux où flottent la liberté les médicaments et la nourriture
Pour Gaza
2
Des avions qui ne volent pas comme des colombes
Des avions qui ne voltigent pas comme des oiseaux
Des avions qui ne chantent pas comme des serins
Des avions de vrombissement
Et de plomb
3
Donc
Pour Gaza encore plus de feu de blocus et de destruction
Pour Gaza encore plus de faim et de soif
Pour Gaza encore plus d’obscurité et de maladie
Soyez heureux Arabes
Heureux de l’été sur les côtes
Des festivals et des voyages
Des hôtels et des danses
De l’éloquence de la poésie et des récompenses
4
Félicitons-nous du pétrole et de l’olivier
Félicitons-nous des turbans des rites et des courants
Félicitons-nous des fatwas
Félicitions-nous de la liberté des femmes dans la nudité
Félicitons-nous de l’économie de marché
De la compétition de chameaux
Félicitons-nous de la patrie
A laquelle nous donnons notre vie
Pour le football
5
Gaza
Un autre matin de blocus
Une autre vague
De sang
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Courcouronnes
Dans la langue latine des anciens
Le village à l’orée de la forêt’ Ou l’entourant
/ Demeure /Courcouronnes ,La france / Kerkouane
La Tunisie / Kirkouk
,L’Irak /Peuples , nations ,pays et continents .
Civilisations en civilisations / Langues et autres ‘langues
Les villes se ressemblent ./
Les arbres s entrelacent
Malgré la chaleur de cet été
Elles éclatent de pure verdure
En sombre verdure
Ici, la lavande rieuse embaume l air .
Là , les coquelicots explosent leurs couleurs
Et là , fleurissent celles qui
rappelant les Francs
ressemblent aux violettes
Et je passe
De la rue Mozart à l angle Lamartine .
Je traverse tour à tour des airs symphoniques et poétiques .
Vers l’arène ont fleuri les jardins suspendus .
J’ai marché d un pas léger
Sur l’herbe mouillée de rosée
Et je m’en excuse .
Soleil , nuages et pluies .
Effusion de perles sur le trottoir .
.
A l’arrêt du bus , je presse le pas .
Sur une jolie colonne verte ,tout à côté ,
je lus l’heure de la prochaine arrivée .
Ainsi que celle d’après .
En minutes et secondes .
Là , le temps en or .
Navré , de perles .
J’attends .
Telle une musique , la cloche sonne huit heures et demie .
Les écoliers sont en rangs .
Ils ouvrent les livres .
La maîtresse dit :
“Lis”
Le bus se dandinant est arrivé
Puis, tristement , s’en est allé .
Les passagers montèrent tranquillement
J’ai validé mon ticket
Tic Tic
Je m’assieds
Bizarre !
Pas de bousculade , pas de cris ni de piétinements .
La vitre est propre et transparente .
Les mouettes se dispersent
Et autour du lac , tournoient .
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